Les collectifs anti gaz de schiste, nouveau visage du terrorisme en France ?

anti_gazL’information serait certainement passée inaperçue si quelques personnes vigilantes ne l’avaient pas exhumée sur le site Internet du Figaro. La brève débute ainsi : « Les services de renseignement de la police ont reçu récemment comme instruction de suivre « au plus près » les entreprises en difficulté afin d’anticiper une éventuelle « radicalisation » de mouvements sociaux ».
D’emblée le ton est donné et il est plutôt inquiétant. De vieux et mauvais souvenirs que l’on espérait enfouis à jamais au plus profond de notre mémoire commencent à remonter à la surface. D’autant plus que cette note du directeur central de la sécurité publique (DCSP) dont se fait écho le Figaro fixe les objectifs prioritaires de la sous-direction d’information générale (SDIG, ex-RG). Jamais rassurant en matière de libertés publiques…

Petit à petit, la lecture de l’article confirme nos craintes lorsque surgissent soudain les dernières lignes : « Parmi les groupes ou milieux à suivre « avec constance », la note évoque les mouvements de défense de l’environnement, qui peuvent être amenées à conduire des « actions fortes » sur les thèmes du nucléaire ou du gaz de schiste qui doivent également « faire l’objet d’une veille permanente » ». Voilà, c’est donc écrit noir sur blanc, « l’ennemi ‘intérieur » pour l’État français, ce sont les mouvements de justice sociale et environnementale.

Il faut relire à deux fois cet article pour être sûr que l’on ne rêve pas. Et se pincer pour croire qu’une telle note ait pu être produite sous un gouvernement de gauche et écologiste… Et pourtant… Et pourtant, au fond, comment être surpris quand on se souvient des récentes déclarations de Manuel Valls sur ce sujet ? Rappelez-vous, c’était le 5 novembre dernier, alors que les forces de l’ordre se déchaînaient contre les opposants à Notre -Dame des Landes.
Ce jour-là, au détour d’une conférence de presse, le ministre de l’intérieur allait nous servir un discours que l’on croyait réservé à l’ère sarkozyste. En quelques secondes, celui-ci dépeignait un tableau anxiogène évoquant « un processus de radicalisation dans de nombreux pays » qui en France a pris « des proportions inquiétantes », le tout nécessitant une coopération policière internationale. Et Valls de préciser sa pensée en citant «des groupes violents gravitant autour de projets comme la ligne ferroviaire à grande vitesse Lyon-Turin ou l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes en France ». Quand on vous disait que l’environnement, ça commence à bien faire !

Discréditer le mouvement anti gaz de schiste

C’est ainsi que se construit une doctrine, une doctrine policière et judiciaire qui aboutit in fine à criminaliser le mouvement social. Et au sein de celui, les militants anti-extractivistes occupent visiblement une place de choix dans l’imaginaire de la place Beauvau.
Impossible de croire évidemment que Manuel Valls agit en cow-boy solitaire. Cette note de la Direction centrale de la sécurité publique ne surgit pas de nulle part. Elle s’inscrit dans un processus visant notamment à décrédibiliser la lutte anti gaz et pétrole de schiste qui perturbe la stratégie gouvernementale.

Dès lors, quoi de mieux que d’affubler de l’habit du parfait petit terroriste, celles et ceux qui sur le terrain, osent s’opposer à ce nouvel eldorado ? Car pour ce gouvernement, qui continue à faire de la croissance son unique boussole, cette énergie est du pain béni. Et n’en doutons pas, ils sont sans doute beaucoup à penser comme Michel Rocard pour qui « La France est bénie des dieux. Pour l’Europe, elle sera au gaz de schiste ce que le Qatar est au pétrole. » Ce n’est pas Arnaud Montebourg qui dira le contraire, lui qui depuis des mois ne cesse de déclarer sa flamme au gaz de schiste.

Le ministre du redressement productiviste a donc besoin qu’on fasse place nette et Manuel Valls ne s’est 16.04ManifestationGazdeSchiste93060_scalewidth_630pas fait prier pour lui rendre, avec l’aide de ses pandores, ce menu service. Il est vrai que dans cette entreprise, l’un et l’autre peuvent compter sur François Hollande. Le chef de l’État n’a t-il pas déclaré en novembre 2012 que « Tant qu’il n’y a pas de nouvelle technique, il n’y aurait pas d’autorisation de permis d’exploration des gaz de schiste. » ? Sous-entendu, si vous me présenter une technique propre, l’interdiction sera levée.

Open bar pour les multinationales pétrolières et gazières ! Et message reçu cinq sur cinq par Montebourg qui lundi 4 février n’a pas fait dans la dentelle lors de la réunion à Lyon du Comité stratégique de la filière chimie-matériaux « La profession nous a demandé aussi d’avancer sur le gaz de schiste » a t-il martelé, tout en rappelant que le gouvernement entendait poursuivre les études sur des techniques d’extraction alternatives à la fracturation hydraulique, qui se voudraient plus respectueuses de l’environnement. La boucle est bouclée.

Alors qu’a débuté en France le débat sur l’énergie, censé précisément imaginer ou tout du moins débattre d’un autre futur énergétique, le ministre en marinière continue sa campagne de lobbying en faveur des énergies fossiles. Entendant ne reculer devant aucun obstacle, il sait donc aujourd’hui qu’il peut compter sur un soutien sans faille. Celui de son camarade Manuel Valls désormais concentré sur son objectif n°1 : mettre hors d’état de nuire les dangereux terroristes anti gaz et pétrole de schiste

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