message reçu par le Sénateur de l’Hérault
07 juin 2011Madame, Monsieur,
Votre courrier relatif à la proposition de loi visant à interdire
l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures de schiste m’est bien
parvenu et a retenu toute mon attention. Je vous en remercie.
Comme vous, je suis révolté et m’oppose fermement à la proposition de loi
transmise par l’Assemblée nationale qui, vous le soulignez, permettrait
aux compagnies pétrolières titulaires d'un permis exclusif de recherches
du gaz de schiste de garder ce permis en déclarant, dans les deux mois qui
suivent l'application de la loi, de ne procéder à des forages avec
fracturation hydraulique « qu'à des fins scientifiques ». Je crains
évidemment les suites dramatiques que cela entraînerait : les plus beaux
paysages de France défigurés par des plateformes de forage de compagnies
pétrolières, sans parler des importants risques sanitaires et
environnementaux…
Dès le début, la mobilisation de nos concitoyens était forte pour
contrecarrer au plus vite une telle proposition de loi. En effet, élus
locaux et citoyens ont découvert, il y a à peine quelques mois de cela,
que le Gouvernement avait octroyé des permis exclusifs de recherches de
gaz de schiste sur leurs territoires. Aucune concertation en amont n’avait
été menée, les permis ayant été octroyés en catimini ! Pourtant, le retour
d’expérience des pays qui exploitent ces gaz et huiles était
particulièrement négatif, faisant état de multiples pollutions et risques
sanitaires.
Les élus, les citoyens et les populations des territoires concernés se
sont donc fortement mobilisés, multipliant les manifestations pour refuser
l’exploration et l’exploitation de ces nouveaux gisements. Et même si le
Gouvernement donne l’impression de revenir sur ces autorisations, les
pressions sont fortes, les intérêts en jeu colossaux et, avec mes
collègues, je n’ai aucune confiance quant à la suite de ce dossier.
Face à cette situation, je ne peux que citer John Maynard KEYNES (Ouvrage
La pauvreté dans l’abondance) : « La même règle autodestructrice du calcul
financier régit tous les aspects de l'existence. Nous détruisons la beauté
des campagnes parce que les splendeurs de la nature, n'étant la propriété
de personne, n'ont aucune valeur économique. Nous serions capables
d'éteindre le soleil et les étoiles parce qu'ils ne rapportent aucun
dividende ».
C’est pourquoi, avec mes collègues, nous avons déposé une contre
proposition de loi visant à interdire purement et simplement l’exploration
et l’exploitation de gaz et huiles de schiste en France. C’est la
proposition qu’a présentée ma collègue Nicole BRICQ lors du débat en
séance publique, le 1er juin dernier.
D’ailleurs, au cours de celui-ci, il s’est avéré que même les sénateurs de
la majorité n’étaient pas convaincus par la proposition de loi soutenue
par le gouvernement : leur faible présence dans l’hémicycle ce jour-là en
a été la preuve, aboutissant à une caricature de débat si bien que
celui-ci a dû être interrompu.
Une telle situation, exceptionnelle au Sénat, illustre bien l’absence de
conviction de la majorité quant au bien fondé de ce texte.
Pour ma part, je continuerai à m’opposer à l’exploration et l’exploitation
des hydrocarbures de schiste et vous demande de redoubler de vigilance
dans les territoires et à poursuivre la mobilisation. Le combat contre les
hydrocarbures de schiste continue !
Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, en l’expression de mes
sentiments les meilleurs.
Robert Navarro
Sénateur de l’Hérault